D'aménagements institutionnels en dérogations constitutionnelles par rapport au principe d'indivisibilité, il s'en faut de peu cependant - tentation récurrente en ce qui a trait à l'outre-mer - que l'on ne sorte de l'État unitaire. Sans conteste, il faut y voir là une démarche propre à la République qui la différencie des autres régimes politiques - du Consulat marchepied de l'Empire à la Restauration, la monarchie de juillet ainsi que le second Empire - qui ont entendu écarter la participation des colonies aux institutions politiques. 271, concl. Ainsi, lorsque la Constituante décréta les 8-10 mars 1790 que si elle considère les colonies comme une partie de l'empire français, « elle n'a cependant jamais entendu les comprendre dans la Constitution qu'elle a décrétée pour le royaume, et les assujettir à des lois qui pourraient être incompatibles avec leurs convenances locales et particulières ». 74, al. Ainsi, le Conseil constitutionnel est en mesure, sur la base des lois organiques définissant les statuts des COM, de déclasser des lois (ordinaires) intervenant dans leur champ de compétence (38). 74, al. Dans la mesure où ces collectivités n'agissent que moyennant une habilitation législative, le périmètre propre au cadre unitaire ne se trouve donc pas dépassé. Une marge que semblerait justifier l'éloignement géographique. D'autant que le Conseil constitutionnel a, de manière opportune, eu tôt fait de corriger cette maladresse dans la décision 2000-435 DC du 7 décembre 2000 en n'évoquant plus que la notion de « populations d'outre-mer » (cons. 248, étude J.-E. Schoettl ; et CE, 1er févr. La procédure est connue, quoiqu'elle fût largement discutée dans ses modalités concrètes autant que ses finalités. La responsabilité pénale des ministres - publié le 10/05/2020, La responsabilité pénale du Président de la République - Des chefs d'États, Conditions générales & politique de confidentialité. 8 C (35). (6) En ce sens, A. Césaire déposa à l'Assemblée nationale constituante, le 26 février 1946, une proposition de loi tendant au classement des « quatre vieilles » comme département français. Ce dispositif de concertation est aujourd'hui étendu à l'ensemble de l'outre-mer. 10). V. Ogier-Bernaud et C. Severino ; RFDA 2004. Par suite, les compétences accordées aux autres territoires ultramarins, même dotés de l'autonomie, ne peuvent qu'être relativisées. (4) V. F. Lemaire, « Le Conseil constitutionnel et l'avenir institutionnel des départements d'outre-mer », RFDA, 2002, p. 361-366. Zoom. Vous pouvez paramétrer vos choix pour accepter les cookies ou non. Mais sa position a par la suite évolué en considérant que l'assimilation n'est pas autre chose qu'« une forme de la domination, et peut-être la plus absolue » (« Crise dans les départements d'outre-mer ou crise de la départementalisation », in Présence africaine, n° 36, 1961, p. 110-111). (25) On cherchera en effet en vain dans la jurisprudence constitutionnelle la mention stricte de l'« unité de la République », même lorsque l'occasion en a été donnée à travers l'article 59 de la loi du 2 mars 1982 qui se référait à ce terme. Même si l'examen des travaux préparatoires de 1958 ne permet pas d'être totalement définitif sur les motifs de l'abandon du terme d'unité dans la Constitution, force est de considérer que ceux-ci inclinent pour le moins à penser que la question de l'outre-mer, en posant la problématique itérative de la séparation et de l'intégration, n'a pas été sans incidence sur le renoncement à cette terminologie ; d'autant que la menace portait également sur le terme d'indivisibilité (9). Le Conseil d'État a conforté cette position en précisant que les assemblées territoriales des TOM sont des assemblées administratives et qu'en conséquence leurs délibérations peuvent faire l'objet d'une annulation par le juge administratif (31). Non pas par une procédure extraordinaire, comme ce fut le cas pour l'Algérie, en recourant à un référendum national approuvant l'autodétermination des populations algériennes ; mais par une lecture assurément constructive du texte constitutionnel, en affirmant avec la doctrine Capitant que le droit d'autodétermination institué en 1958 n'était pas forclos et pouvait s'exercer par l'intermédiaire de l'article 53, al. 73, al.4) que pour les COM (art.74, al. Le principe d’indivisibilité de la République se rapporte à l’article 1er de notre Constitution actuelle de 1958. 7 leur donnant la possibilité d'instituer une assemblée unique se substituant aux assemblées des DOM-ROM de chacun des territoires. Mais plus que jamais, compte tenu des exigences internationales de décolonisation, le moment parut opportun d'offrir aux territoires ultramarins un large choix, pour une fois celui-ci effectué : verrouiller à nouveau et définitivement - pensait-on - la République. Les groupes successifs qui ont émigré ne rentrent pas dans le cadre de cette étude. Il est ainsi loisible pour les DOM de se transformer en COM et inversement pour les COM de devenir des DOM. Que dans ce mixte relationnel, l'unité statutaire ait été sacrifiée (I) au profit de l'indivisibilité politique (II), au point de faire disparaître de la Constitution le terme d'unité pour ne conserver que celui d'indivisibilité surprend alors moins, quand bien même une partie de la doctrine a identifié ces notions comme synonymes en évoquant un seul et unique principe (7). Et si s'agissant de la nouvelle catégorie des collectivités d'outre-mer (COM) qui se substitue à celle des TOM, l'intention est bien celle d'une unification catégorielle ; il demeure que cette nouvelle catégorie ne joue que le rôle des utilités pour regrouper des statuts en réalité marqués par leur hétérogénéité. Autrement dit, l’indivisibilité de la République est prolongée par l’unité de la nation souveraine (article 72-3 de la Constitution), qui semble interdire toute différenciation : la France ne connaît pas d’autres peuples que le peuple français, exempt de minorités et uniformément soumis à … (37) V. les articles LO 6213-5 et LO 6313-5 CGCT adoptés dans le cadre de la loi organique du 21 février 2007, portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer. Tout cela justifie qu’elle soit reconnue, en tant que telle, dans la Constitution. C'est assez dire que la relation de la France à son outre-mer est traversée par la tension entre les forces centrifuges et l'intégration républicaine, entre la recherche d'indépendance ou d'autonomie des territoires ultramarins et l'affirmation dans le même temps d'une plus grande prégnance des principes républicains. Ce débat n'a du reste pas été sans incidence pour une partie de l'outre-mer, celle assujettie au principe d'assimilation, puisque statuant sur le cas des DOM, le Conseil constitutionnel avait affirmé que les adaptations devaient respecter certaines compétences propres à chaque catégorie. Si donc évolutions majeures il peut encore y avoir dans l'organisation étatique, elles transiteront préalablement par l'outre-mer ; représentation cependant bien moins déformée qu'auparavant de ce qu'est la République. V. Ogier-Bernaud et C. Severino ; RFDA 2004. 1 - Fondement actuel du principe : l'article 1er de la Constitution Française : "Art. De l'autre E. Herriot, notamment, qui considère le fédéralisme dangereux et fait courir le risque que la France devienne, selon sa célèbre formule, « la colonie de ses anciennes colonies » (12). (13) V. l'article 60 de la Constitution de 1946 : « L'Union française est formée, d'une part, de la République française qui comprend la France métropolitaine, les départements et territoires d'outre-mer, d'autre part, des territoires et États associés. C'est une façon, maladroite, mais non ambiguë de rappeler dans le titre XII consacré de manière générale aux collectivités territoriales son égale appartenance à la République, en dépit de sa spécificité constitutionnelle et son inclusion dans un titre spécifique (titre XIII). 156, obs. les décisions relatives aux « attaches avec une partie déterminée du territoire de la France » : 84-177 DC du 30 août 1984, loi relative au statut du territoire de la Polynésie française, cons. décisions 96-373 DC du 9 avril 1996, AJDA 1996. C'est le cas pour les notions très singulières de « peuple kanak » et de « souveraineté partagée », mais qui - sauf affirmation contraire du Conseil constitutionnel - n'ont pas un caractère prescriptif et sont a priori dépourvues de caractère normatif dans le préambule de l'accord de Nouméa (34). Confronté à des mesures prises par les assemblées territoriales de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie, le Conseil d'État s'est inscrit dans la même veine, notamment dans l'arrêt d'assemblée du 29 avril 1994, Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en précisant que les dispositions qui fixent en 1988 les compétences de l'État, du Territoire et des provinces de Nouvelle-Calédonie « n'ont eu ni pour objet ni pour effet d'habiliter ces dernières collectivités à prendre des mesures affectant les conditions essentielles de la liberté d'association » (32). Pensée par des étudiants, la plateforme Pimido utilise des outils de détection anti-plagiat pointus, permettant l'analyse et l'optimisation de contenu rédigé par des étudiants ou des professionnels. Ainsi, alors qu'avant la réforme constitutionnelle de 1992, la langue tahitienne avait été reconnue par une décision territoriale comme une langue officielle sur le sol polynésien ; depuis la révision, cette mention a disparu dans la loi organique du 27 février 2004 relative au nouveau statut de la Polynésie française (30). 465, tribune J.-C. Douence ; D. 2003. V. également l'arrêt CE, 13 mai 1994, n° 112409, Président de l'assemblée territoriale de la Polynésie française, au Lebon ; AJDA 1994. Mais pour toute formelle qu'ait été la maladresse évoquée, elle n'est pas moins le symptôme de la difficulté à ne pas dissocier sur ce point l'outre-mer, même à la suite de la suppression, par la révision constitutionnelle du 4 août 1995, de l'article 1er originaire de la Constitution de 1958 (27) et du titre XIII relatif à la Communauté. Arrivés en Guy… 2) n'étonne qu'à moitié. cit, p. 614). S’abonner par courriel à la revue Titre VII ou aux notifications du Conseil constitutionnel pour être informé en temps réel sur le contentieux (saisines, décisions et communiqués de presse). 147, obs. La formule révolutionnaire « La République est une et indivisible » … Nul n'ignore que le principe d'un abandon de l'unité statutaire ou de l'uniformité statutaire des collectivités territoriales a fait l'objet, à la suite de la première phase de décentralisation de 1982, d'une véritable querelle doctrinale sur la thématique des limites ou pas à la diversification territoriale pour chaque catégorie de collectivité territoriale. CC0 Descargar. L’indivisibilité est un principe constitutionnel et républicain présent à l'article 1 de la Constitution, il a une valeur supérieure d'où la valeur républicaine,« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Vous pourrez également modifier vos préférences à tout moment en cliquant sur le lien "Paramètres des cookies" en bas de page de ce site. On n'insistera pas sur ce débat qui n'a aujourd'hui qu'un intérêt historique au regard du caractère somme toute inéluctable du mouvement de décolonisation ; ni sur l'issue du droit d'option ouvert dans le délai de quatre mois aux territoires d'Afrique et de Madagascar restants. 3 de l'article 72-3 au lieu de l'al. Au fond, il s'agirait moins de discuter des seuls dogmes et principes posés que de la réalité institutionnelle. Pour ne se limiter qu'au droit établi : c'est en revanche chose avérée avec le pouvoir législatif, formellement accordé à l'assemblée territoriale, dans une rupture ici consommée avec la tradition multiséculaire de la loi comme principale marque de souveraineté. J.-M. Belorgey, S. Gervasoni et C. Lambert, note M.-T. Viel). C'est ce compromis qu'énonce l'alinéa 1er de l'article 72-3 : « La République reconnaît au sein du peuple français, les populations d'outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité ». De 1792 à 1794, les jacobins ont exercé les fonctions de commandement et ont été les artisans de la victoire. La République une et indivisible. (12) JO, débats Assemblée nationale constituante, 2e séance du 27 août 1946, p. 3334. Montesquieu en fait l’éloge et la théorie, la Révolution instaure la Première République. 1125, obs. Certes, ce n'est pas sans difficulté que le principe d'unicité du peuple français, corollaire de l'indivisibilité de la République a été appliqué à l'outre-mer. Exposé de 1 pages en droit constitutionnel : L'indivisibilité de la République Française. République indivisible : définition, synonymes, citations, traduction dans le dictionnaire de la langue française. 6 pour les DOM et art. 1125, obs. 1243, note L. Philip. 248, étude J.-E. Schoettl. 598, note J.-M. Larralde ; ibid. 1124, et les obs., obs. Une manière donc de corriger l'interprétation parfois confuse qui a pu être faite de l'alinéa 2 du préambule évoquant la libre détermination des peuples mais aussi - dans une même rhétorique - l'adhésion aux institutions dans « l'idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité » (28) ! Si bien que l'ambiguïté des rapports n'a cessé de s'agrandir, malgré les tentatives régulières de règlement, elles-mêmes non dépourvues d'ambiguïté : de la loi du 19 mars 1946 de départementalisation pour « les quatre vieilles » (Guadeloupe, Martinique, Réunion et Guyane française) posant le principe de l'application du droit commun de la métropole à la reconnaissance pour les territoires ayant reçu l'appellation de territoires d'outre-mer (TOM) - dans le cadre de la IVe comme de la Ve République - d'un statut particulier « tenant compte de leurs intérêts propres dans l'ensemble des intérêts de la République ». Aussi comprend-on l'intérêt du rappel constant de l'appartenance des territoires ultramarins à la République (3). Dans le langage juridique le mot est utilisé pour qualifier une prestation qui, soit naturellement, soit par la volonté commune des parties contractantes, ne peut faire l'objet d'une exécution partielle. Etant entendu que la Nouvelle-Calédonie ne dispose d'aucun pouvoir d'auto-organisation à caractère constitutionnel. Sans doute la proclamation de la République (22 septembre 1792) puis de son unité et indivisibilité (25 septembre suivant) a-t-elle conduit à réviser cette position qui, par différents biais, semblait peu en phase avec les principes issus de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Ayant refusé le 10 janvier 2010 d'accéder à une autonomie plus grande en devenant des COM, la Guyane et la Martinique ont en revanche approuvé le 24 janvier suivant la mise en place d'une collectivité unique exerçant conformément à la question posée « les compétences dévolues au département et à la région tout en demeurant régie par l'article 73 de la Constitution ». (34) F. Garde, « Le préambule de l'accord de Nouméa, prologue d'une histoire officielle ? Du moins, doit-on admettre que l'outre-mer constitue toujours un réel vivier d'expérimentation, qui a largement nourri les évolutions récentes vers une territorialisation des droits, une plus grande décentralisation et l'institutionnalisation de mécanismes concertatifs et consultatifs permettant des changements statutaires pour l'ensemble des collectivités territoriales (cf. Elle interdit à l’Etat de partager la souveraineté à l’intérieur, avec les collectivités territoriales et les groupes primitifs15, ou avec d’autres Etats et organisations internationales, à l’extérieur16. L’indivisibilité de la république et la libre administration des collectivités territoriales Dans le cadre de la décentralisation déconcentration «  c’est toujours le même marteau qui frappe mais on en a raccourci le manche. Formule du Conseil d'Etat dans l'arrêt Desnoyez et Chorques (10 mai 1974) : qui énonce que traiter de manière identique des personnes qui se trouvent dans des situations différentes, c'est rompre l'égalité. C'est ce que laisse apparaître la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 sur l'organisation décentralisée de la République (20) qui reformule le rapport de la République à l'outre-mer. 474, note A. Viola ; 2004-490 DC du 12 février 2004, D. 2005. Le Constituant réalise ainsi un compromis adapté au principe - traditionnel dans la République - d'opposition à la reconnaissance de minorités, en faisant des populations d'outre-mer une réalité démographique et géographique, certes incontournable, mais qui en tant que simple composante demeure subsumée au concept juridique de « peuple français ».